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« Sainte Eugénie de Rome » et Varzy

Le temps d’une halte à Varzy revient l’image de Sainte Eugénie, martyre du IIIème siècle, dont la vie fut une extraordinaire aventure.

Sur place, elle a donné son nom à une fontaine, à un lavoir, et à une rivière succédant au ruisseau de Cœurs, qui serpente de Varzy à Corvol-l’Orgueilleux où elle rejoint le Sauzay, affluent de l’Yonne. L’ancienne collégiale de Varzy, qui lui fut dédiée, se mirait dans le grand bassin alimenté par des sources sortant de ses entrailles calcaires. Les chanoines ont animé la vie de la cité pendant treize siècles, mais leur église, plusieurs fois reconstruite, fut détruite à la Révolution.

Ancienne cité épiscopale auxerroise au cœur du comté de Nevers (chât. de Montenoison), Varzy n’était pas en Donziais. Les évêques d’Auxerre y séjournaient dans leur vaste château où ils recevaient l’hommage des barons de Donzy et d’autres vassaux de la contrée qui, suivant l’expression consacrée, étaient « dans la mouvance de la Tour d’Isoard », c’est-à-dire sous la suzeraineté temporelle de l’évêque exercée à Varzy. On a peine à imaginer que le modeste édifice carré qui forme l’extrémité sud du palais épiscopal, ultime trace de cette fameuse tour, ait pu accueillir les rencontres de ces puissants personnages.

« Sainte Eugénie de Rome » fut spécialement vénérée dans le diocèse à partir du Xème siècle. L’évêque Gaudry avait en effet rapporté des reliques offertes par le Pape en 923, et les avait réparties entre sa cathédrale, l’abbatiale Saint-Germain d’Auxerre et la collégiale de Varzy.

Des vitae anciennes et la tradition ont rapporté l’histoire d’Eugénie, avec les imprécisions et les dérives de l’hagiographie. Tôt convertie au christianisme, elle s’était travestie en homme car elle souhaitait absolument entrer dans un certain monastère. Elle en avait même été élue plus tard abbé. Accusé injustement de viol par une vieille femme dont « il » avait repoussé les avances après l’avoir guérie, « l’abbé Eugène » dévoila sa féminité devant ses juges pour prouver son innocence. Eugénie fut cependant condamnée à mort par l’empereur Valérien, résista à de nombreux supplices et fut finalement décapitée à Rome en 257.

C’est donc sous les traits d’une personne – moine ou jeune femme – qui se dénude que la sainte est généralement représentée.

Son souvenir est illustré dans la région par un chapiteau de la travée orientale de la nef de Vézelay, qui appartenait originellement au chevet roman (XIIème siècle). Il en donne une représentation très réaliste.

Mais c’est surtout l’exceptionnel triptyque dit du « Martyre de Saint Eugénie », replacé dans le chœur de l’église Saint-Pierre-ès-Liens après la destruction de la collégiale, qui retient l’attention à Varzy.

Nous en proposons ci-dessous une photo, suivie d’un texte tiré d’une intéressante plaquette proposée sur place.

Triptyque du martyre de Sainte Eugénie 

Un chef d’œuvre de la Renaissance française (Conservation des musées et du patrimoine du Département de la Nièvre) : 

« Longtemps donné à un hypothétique « pseudo Félix Chrétien » du nom d’un chanoine du chapitre épiscopal d’Auxerre, ce triptyque a été commandé en 1535 par François II de Dinteville, évêque d’Auxerre, pour la collégiale Sainte-Eugénie de Varzy, dans le but d’expier une ou plusieurs fautes encore non identifiées. Varzy était alors la résidence d’été des évêques d’Auxerre.

Ce « pseudo Félix Chrétien », depuis les travaux de l’historien d’art Jacques Thuillier au début des années 1960, complétés par quelques études récentes, commence à dévoiler son identité. Il s’est représenté dans le triptyque de Varzy entre les jambes du bourreau, et ce même visage apparaît aussi derrière les quatre frères Dinteville dans le remarquable panneau allégorique, daté de 1537, conservé au Metropolitan Museum de New-York : Moïse et Aaron devant Pharaon. Cette évidente proximité avec la puissante famille Dinteville, dont les membres et l’entourage apparaissent dans les deux œuvres, fait qu’on le surnomme aujourd’hui « le maître de Dinteville ».

Par ailleurs, les armes de la ville de Haarlem, ainsi que celles des peintres hollandais de la Guilde de Saint-Luc, apparaissent dans le décor du panneau central de Varzy : le « maître » en question est sans doute natif de cette ville. Et il a probablement fait un séjour à Rome, comme l’atteste la puissance avec laquelle il traite ses personnages. Au cœur géographique de ces deux pôles : la Bourgogne, point central des deux commandes évoquées ci-dessus. Un artiste pourrait répondre à ces critères : Bartholomeus Pons, dont la présence est attestée dans un atelier de peintre à Tournus en 1518.

Classé Monument historique le 31 mai 1897, le triptyque a, depuis sa création, connu une existence mouvementée. Lors du démantèlement de la collégiale Sainte-Eugénie, pendant la Révolution, il est chargé sur une charrette en partance pour Auxerre, au grand dam des Varzycois. Heureusement, une opportune rupture d’essieu dans un raidillon à la sortie de la ville leur ramène le tableau, qui prend place dans l’église Saint-Pierre. L’ensemble est ensuite démembré : les deux volets latéraux seront retrouvés en 1846 dans la sacristie, en piteux état. Plus tard, c’est Napoléon III qui se fait pressant pour l’acquérir, et l’offrir à son épouse Eugénie de Montijo, dont il honore la sainte protectrice. Redécouvert par Jacques Thuillier, qui le publie en 1961 dans l’ouvrage collectif « Art de France », le triptyque ne quittera Varzy qu’une seule fois, en 1964-1965, pour la grande exposition « Le Seizième Siècle », présenté à Paris, au Petit Palais. Il aura auparavant bénéficié d’une restauration complète dans les ateliers du Louvre, qui nous permet aujourd’hui d’admirer ce véritable chef-d’œuvre qui prouve à lui seul qu’une Renaissance a existé en France, en province, en marge de l’Ecole de Fontainebleau et des grandes commandes royales. »

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Il faut vraiment s’attarder à Varzy, qui illustre le passé auxerrois de la région, et recèle de superbes trésors…

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Villiers-le-Sec, mouvant de Varzy

(Illustration : Auxerre, cathédrale Saint-Etienne)

Villiers-le-Sec, entre Varzy et Clamecy, est aujourd’hui un petit village où aucune trace castrale n’est là pour rappeler qu’il a été un fief très ancien, relevant de la Tour de Varzy des évêques d’Auxerre. Pour cette raison il ne figure pas dans l’Inventaire des Titres de Nevers.

Château épiscopal de Varzy (vers 1900)

Villiers-le-Sec aurait été donné au chapitre de sa cathédrale, à l’époque de Charlemagne, par Maurin, 33ème évêque d’Auxerre de 771 à 799. « …A l’imitation de son prédécesseur de bonne mémoire (ndlr : Aidulf), il donna de ses biens propres à Saint-Etienne (ndlr : sa cathédrale et son chapitre) pour satisfaire les besoins des pauvres. Ces biens se trouvent dans le pagus de Tonnerre, dans la villa appelée Fontenay. Il y ajouta, pour l’entretien des chanoines, une petite terre dont il était propriétaire, appelée Villiers, non loin de Varzy, qu’il avait reçue d’une matrone appelée Rocla« . (Extrait de sa notice dans les « Gestes des Evêques d’Auxerre » (Tome I, Les Belles Lettres, Paris, 2006)

Ce fief a été détenu, dans des conditions qui restent obscures, soit par inféodation du châpitre d’Auxerre, soit par usurpation aux premiers temps de la féodalité, par les sires de Saint-Verain, à l’instar de Saint-Pierre-du-Mont tout proche , ce qui explique notre intérêt, bien qu’il soit hors de notre périmètre. D’autres familles implantées en Donziais leur ont succédé.

Vendu en 1320 à Pierre Anceau, premier connu d’une lignée bourgeoise de Varzy, Villiers-le-Sec s’est transmis à ses descendants sur 15 générations jusqu’à Jacques Gabriel de La Ferté-Meung, officier général et diplomate, dont nous avons rencontré la famille, éteinte au XIXème siècle, en plusieurs sites – voir sa généalogie dans la page familles  -.

Les deniers titulaires de Villiers-le-Sec auraient eu un petit château à Cuncy-les-Varzy, tout proche, dont ils étaient également les seigneurs. Cette terre fut vendue comme « Bien de la Nation ».

Cuncy-les-Varzy, église Saint-Martin

Voyez ci-dessous une notice décrivant la dévolution de ce fief épiscopal.

Villiers-le-Sec. (V1 du 6 nov 2023)

 

 

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Les Dupin en Donziais

L’exceptionnelle réussite des trois frères Dupin, fils d’un député à l’Assemblée législative de 1791,  sous la Restauration et la Monarchie de Juillet, a conféré à leur nom une véritable aura en Nivernais.

André Dupin l’aîné, avocat, jurisconsulte, homme politique éminent, haut magistrat, membre de l’Institut, châtelain de Raffigny en Morvan, a sa statue à Varzy. Son brillant parcours, de la Restauration au Second Empire, a fait l’objet d’une journée d’étude de la Société académique du Nivernais en 2014, dont les actes ont été publiés.

Charles Dupin, le cadet, savant ingénieur naval, député, ministre, lui aussi membre de l’Institut, châtelain de Corbelin, restaura l’abbaye du Réconfort, lieu de la sépulture de Mahaut de Courtenay.

Philippe Dupin, le benjamin, fut lui aussi député de la Nièvre et de l’Yonne, et châtelain de Chitry-la-Mine.

Cette famille de la bourgeoisie judiciaire était originaire de Varzy, vieille cité épiscopale aux confins de l’ancien diocèse d’Auxerre, où elle est connue depuis André Dupin (1549-1620). Elle n’était donc pas à proprement parler donziaise, mais outre l’implantation de Charles à Corbelin, une branche cadette détint les terre et forge de Croisy, à la Chapelle-Saint-André, et celle de Ferrières, à Entrains.

Nota : aucun rapport avec la famille d’Aurore Dupin, baronne Dudevant – George Sand – qui était berrichonne.

Voyez ci-dessous une notice généalogique qui retrace la remarquable épopée de ces juristes, rigoureux et acharnés. La gloire parisienne des trois frères ne leur a pas fait négliger leur vieux pays d’origine où ils se sont magnifiquement établis et sont constamment revenus.

Famille Dupin

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