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Le dernier baron de Perreuse

Perreuse, dont nous avons déjà parlé, était une terre des barons de Toucy, au sud de leur espace féodal relevant des évêques d’Auxerre. Dans le partage intervenu entre les filles du maréchal Jean de Chabannes (1503) elle fut associée à Saint-Fargeau, dont les seigneurs furent parfois désignés comme « barons de Perreuse » ; un titre dont on ne connaît pas l’origine mais qui attestait du contrôle exercé sur plusieurs paroisses et arrière-fiefs de la Puisaye méridionale.

Le rattachement des châtellenies de Druyes et Saint-Sauveur à la baronnie de Donzy au XIIIème siècle avait fait des barons de Perreuse des vassaux des comtes de Nevers « à cause de Donzy ». L’histoire féodale de cette terre constellée de manoirs au milieu de vastes forêts devait s’achever sur un épisode sanglant de la Révolution : l’assassinat du dernier d’entre eux.

Louis Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, né en 1760, était un pur produit de la « grande robe » : fils de Michel Etienne, président à mortier au Parlement de Paris dont il hérita très jeune de la charge, petit-fils de Louis Michel, maître des requêtes, et arrière-petit-fils de Michel Robert Lepeletier des Forts, ministre d’Etat, Surintendant des Finances, acquéreur de Saint-Fargeau en 1715. Il avait épousé la fille d’un autre mortier, ce qui avait sans doute arrondi encore sa pelote. A la tête de vastes propriétés – Saint-Fargeau couvrait à elle seule plusieurs milliers d’hectares -, député de la noblesse en 1789, il n’était pas prédestiné à une carrière révolutionnaire. Mais alors que son contemporain le grand Malesherbes (Lamoignon), ouvert comme lui aux idées nouvelles, optait pour la fidélité au Roi – ce qui lui valut la guillotine -, Lepeletier, héritier d’une famille qui contestait de longue date l’absolutisme royal, vota sa mort. Cela le condamna également d’une autre manière.

Il avait été un jeune magistrat béni des dieux : avocat général au Parlement de Paris – une fonction dans laquelle il excella – puis président à mortier à 25 ans. Sa morgue était parfois critiquée mais son talent reconnu. Acquis aux Lumières, il fut un acteur important du processus révolutionnaire à ses débuts. Reniant vite ses origines il fit adopter l’abandon des titres de noblesse le 17 juin 1790, et ne fut plus dès lors que Michel Lepeletier…. tout en préservant pour sa descendance de grands biens fonciers.

Président de l’Assemblée Constituante à 30 ans, il tenta sans succès de faire abolir la peine de mort par le nouveau Code Pénal de 1791, qui ne condamnait plus, suivant ses propres termes les « crimes imaginaires » et autres « délits factices, créés par la superstition, la féodalité, la fiscalité et le despotisme »…

Elu la même année Président de l’Administration départementale de l’Yonne, il devint en 1792 son député à la Convention, au sein de laquelle il siégea avec la « Montagne ». Il y promut la liberté de la presse et fut l’auteur d’un projet d’Education « nationale et égalitaire », qui entendait placer tous les enfants entièrement sous la responsabilité de l’Etat. Mais c’est le projet de Condorcet, plus élitiste et moins totalitaire, qui fut retenu.

Malgré son opposition de principe à la peine capitale et non sans quelques hésitations – suggérées peut-être par sa position sociale – il vota donc la mort du Roi le 20 janvier 1793. Le soir même, un ancien officier aux Gardes du Corps le transperçait d’un coup de sabre dans un restaurant du Palais Royal ; il expira chez lui quelques heures avant le citoyen Capet. Il fut inhumé dans un premier temps au Panthéon puis ses restes furent transférés à Saint-Fargeau. Il devint le premier « martyr de la Révolution », inspirant le fameux tableau de David qui le représente mourant et fit de lui une figure mythique.

Les portraits qu’on a de lui par ailleurs donnent à voir plutôt un gentilhomme – né aquilin, tenue soignée – qu’un tribun populaire.

                                                   

Né marquis de Saint-Fargeau, baron de Perreuse, seigneur de nombreux fiefs dans plusieurs régions de France, et nanti des revenus correspondants, sa première vie ne fut pas celle d’un aristocrate campagnard, mais celle d’un jeune haut magistrat cultivé – il écrivait dès son plus jeune âge – et très actif au cœur du pouvoir judiciaire, au sein duquel il avait une réputation de grande compétence et de travail acharné . Cela le préparait à un rôle politique éminent et imminent.

Mena-t-il un tant soit peu une vie rustique pendant ses vacances d’enfant ? Arpenta-t-il les grandes salles de Saint-Fargeau ? Chevaucha-t-il dans ses grands bois ? Lepeletier n’a malheureusement pas eu le temps d’écrire ses mémoires. On sait simplement par son demi-frère Félix qu’il était un seigneur bienveillant. Ce dernier a en effet publié en 1826 des « Œuvres de Michel Lepeletier Saint-Fargeau : député aux assemblées constituante et conventionnelle, assassiné le 20 janvier 1793, par Paris, garde du roi ; précédées de sa vie, par Félix Lepeletier, son frère ; suivies de documents historiques relatifs à sa personne, à sa mort et à l’époque » (Bruxelles, Arnold-Lacrosse, 1826). Elles ne donnent guère d’indications sur sa présence en Puisaye mais au détour d’un paragraphe on peut lire : « ..vous aussi habitants de Sougères, joli hameau du département de l’Yonne, vous n’avez pas oublié non plus, lorsqu’un feu destructeur réduisit presque toute votre commune en cendres, vous n’avez pas oublié dis-je, qui vous tendit une main secourable… »

Saint-Fargeau passa à sa fille Suzanne, puis à ses descendants ; la page révolutionnaire était depuis longtemps tournée et la vie y avait repris son cours aristocratique. Ce site exceptionnellement bien conservé donna deux cents ans plus tard à son arrière-petit-fils Jean d’Ormesson la matière d’un beau roman.

Lepeletier avait-il connu le château et les murs de Perreuse, presqu’intégralement disparus. Devenu un modeste village fusionné avec la commune de Treigny (89), le site conserve de belles traces de cette période faste.

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Montreparé, à Lainsecq

Abritant aujourd’hui une simple ferme, le hameau de Montreparé, à Lainsecq (89) montre les traces d’une enceinte circulaire et on y fait état de vestiges d’un château.

C’était une seigneurie ancienne, relevant à la fois de Toucy (Puisaye), et en arrière-fief de Trucy-l’Orgueilleux, pour laquelle Jeanne de Mello, dame de Lormes, de Château-Chinon et de Trucy, femme du Connétable Raoul de Brienne, rendit aveu en 1320 au comte de Nevers, en même temps que pour Paroy, à Oisy (58).

Sa fille Jeanne de Brienne, comtesse d’Etampes, fit don de Trucy à Guillemin du Bois ou à son fils Jean, son écuyer, dont les possessions passèrent par alliance aux sires d’Armes – voir à leur sujet la notice sur Vergers  -.

Montreparé avait été donné après la mort de Jeanne à Alexandre de Bazoches, sgr de la Motte-Josserand. En épousant Jean d’Armes, son arrière-petite-fille : Jeanne Lamoignon apporta sans doute Paroy et Montreparé, les réunissant ainsi à Trucy qui était venu aux sires d’Armes, avec Vergers, par Jean du Bois.

Mais le cheminement successoral exact de Montreparé reste hypothétique : cette terre disparaît des sources après Alexandre de Bazoches et ne reparaît que dans les mains des La Ferté-Meung au XVIème siècle, puis des Vathaire de Guerchy, au début du XVIIIème siècle.

On a formulé ci-dessous l’hypothèse qu’elle s’est transmise, en même temps que Trucy et Paroy, et qu’elle fut acquise par Nicolas-François de Vathaire, dont la famille la conserva jusqu’à la Révolution et en prit le nom.

Voyez, ci-dessous une version augmentée de la notice décrivant la succession des seigneurs de Montreparé. Nous y formulons des hypothèses logiques, mais des zônes d’ombre demeurent. 

Merci de vos contributions pour les éclaircir !

Montreparé (V4 du 22/12/21)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Perreuse, charmante baronnie

La petite cité médiévale de Perreuse était le siège d'une seigneurie, devenue baronnie en 1450, relevant de Toucy, puis de Saint-Fargeau. Les seigneurs puis barons de Perreuse furent donc les barons de Toucy puis les seigneurs (et comtes) de Saint-Fargeau (voir page Toucy-St-Fargeau). Elle fut fortifiée et le seigneur y avait son château. Ces constructions médiévales ont presqu'entièrement disparu.

De Perreuse dépendaient de nombreux fiefs plus ou moins importants, comme Treigny, La Bruère, Guerchy, RatillyBoutissaint, ou Test-Milon  (voir ces notices), ou encore Perchin, Montreparé, Fosse-Gilet, les Mées, Sainpuits…etc.

Le village, perché sur une éminence, conserve de nombreuses traces de ce passé glorieux, et notamment une superbe maison ou "hôtel seigneurial" du XVème siècle, dans laquelle résidaient les "capitaines de Perreuse", qui y représentaient le seigneur. Perreuse et Treigny sont aujourd'hui associées.

                                            P1000521

 

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Beauvais et Lainsecq

(Illustration : château de Beauvais)

L’histoire de la seigneurie de Beauvais, associée à celle de Lainsecq (châtellenie de Saint-Sauveur), est très liée à celle de la baronnie de Toucy. Le fief échut au XVIème siècle à la famille nivernaise de La Ferté-Meung (sur cette famille voir : « la famille de Meung et ses alliances », par Jean Mesqui), via les sires de Savoisy et ceux de La Rivière. Un petit château XIXème a remplacé l’ancienne demeure féodale. Le parc, remarquable, est inscrit à l’Inventaire du patrimoine.

La terre de Lainsecq-Beauvais aurait pu être apportée aux Savoisy par le mariage de Charles de Savoisy (1368-1420), sgr de Seignelay – un personnage important de la Cour de Charles VI, dont il était le Chambellan et l’ami – avec Yolande de Rodemachern, héritière des comtes de Bar-Toucy (voyez leur généalogie complète sur Racineshistoire).

François de La Ferté-Meung, premier nommé « sgr de Beauvais », fils d’Anne de La Rivière, a sans doute hérité de ces terres par l’échange que fit le père d’Anne avec son cousin Savoisy, puisque les enfants du bâtard Henri de Savoisy, à qui elles avaient été données, n’eurent pas de postérité. Ce François pourrait être le constructeur du premier château.

Elle échut enfin par alliance en 1644 aux Le Caruyer, d’origine normande, (ou « Le Caruyer de Beauvais ») dont les descendants l’ont conservée.

Voyez la liste des seigneurs dans la notice ci-dessous (V5 augmentée du 10 jan 2020), que vous pourrez nous aider à préciser :

Beauvais

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Saint-Amand-en-Puisaye

(Illustration : figurine en grès de Carriès – Musée de St-Amand)

Saint-Amand, le plus important des châteaux de la Renaissance en Nivernais-Donziais, a été construit sur l’emplacement d’une forteresse féodale édifiée sur le tracé de l’ancienne voie romaine qui reliait Autun à Orléans. C’était une grande terre détenue par les barons de Toucy, et à leur suite les comtes de Bar, jusqu’au XVème siècle. 

En 1405 elle passe par mariage à Jean IV le Hutin d’Aumont, échanson du Roi, dont une descendante épouse en 1478, François de Rochechouart, premier chambellan de Louis d’Orléans puis de Louis XII, et sénéchal de Toulouse (voyez sur Racineshistoire la notice consacrée à cette grande famille). Son fils Antoine de Rochechouart, qui fait construire le château qu’on peut voir de nos jours, n’est pas moins illustre. Capitaine de 50 hommes d’armes des ordonnances du roi, il devient chambellan de François Ier, puis reprend la charge de Sénéchal de Toulouse et d’Albigeois. Il participe à la guerre d’Italie et, blessé à la bataille de Cérisoles en 1544, il meurt de ses blessures. 

Tombée en indivision, la seigneurie passe aux mains de Marie du Breuil, épouse de Claude de Bourdeilles – petit-neveu de Brantôme (Pierre de Bourdeilles) -, plus connu sous le nom de « Chevalier Matha ». Ayant pris parti pour la Fronde, il est invité à retourner dans ses terres et se retrouve voisin de la Grande Mademoiselle, exilée quant à elle à Saint-Fargeau.

Après avoir été acquise en 1659 par le cardinal Mazarin pour son petit-neveu Philippe-Jules Mancini – dont le père devait, deux ans plus tard, hériter du duché de Nivernois – la seigneurie est revendue en 1710.

Erigée en marquisat, elle est tenue en 1731 par Léonard Guyot, receveur général des aides et domaines du roi, secrétaire du roi. Son fils et successeur, Antoine Léonard Guyot, est grand bailli d’épée et gouverneur d’Auxerre en 1776, mais il émigre à Stuttgart au début de la Révolution. Le château serait devenu bien national si sa sœur, la « citoyenne Félicité Guyot-Dufraisse » n’eût établi qu’elle ne figurait pas sur la liste des émigrés. La terre de Saint-Amand ne changea finalement pas de famille : en 1793 était né à Stuttgart Charles François Guyot qui retrouva le titre de marquis sous la Restauration et le château de son père.

Après divers avatars, le château de Saint-Amand devint un haut-lieu du renouveau de la poterie de Puisaye, dont il est aujourd’hui le Musée.

Voyez ci-joint une notice plus détaillée, qui présente le château lui-même, et la succession des seigneurs de Saint-Amand :

Saint-Amand-en-Puisaye  (V3 améliorée du 22/12/21)

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