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« Marchands de bois pour la fourniture de Paris »

Alors que dans la vallée du Nohain, au cœur de la baronnie de Donzy, l’essor des moulins à forge avait profondément bouleversé l’économie rurale, dans celle de l’Yonne – dont l’ancien Donziais incluait un tronçon autour de Chatel-Censoir, ainsi que le cours du Sauzay jusqu’aux portes de Clamecy – la fourniture du bois de chauffage pour la capitale joua ce même rôle à partir du XVIème siècle.

Initié à Moulins-Engilbert et à Clamecy par Rouvet et Sallonyer, le flottage des bois du Morvan depuis la Cure, l’Yonne et leurs affluents,  jusqu’au port de la Tournelle à Paris via la Seine, connut un développement exceptionnel qui perdura jusqu’au début du XXème siècle. Chatel-Censoir, comme Coulanges, Mailly-la-Ville ou encore Vermenton, en était une étape importante. C’est aux pieds de la vieille cité que le système des « trains de bois » fut expérimenté, qui remplaça avantageusement les bateaux dont les opérations de chargement et de déchargement alourdissaient le prix des bûches vendues à Paris.

« Aujour d’huy est venu au Bureau de la Ville maistre Charles Leconte, maistre des œuvres de charpenterie de l’Hostel de ceste ville de Paris, lequel nous a dict et remonstré avoir fait charroyer d’une vente de boys par luy prinse de Madame la duchesse de Nevers, les boys des Garammes près Chasteau-Sans-Souef (NDLR : Chatel-Censoir), pays de Nivernoys, grande quantité de bois de chauffage dont à présent il en a faict admener du port du dict Chasteau-Sans-Souef, sur la petite rivière d’Yonne, tant par la dicte petite rivière d’Yonne, la grande rivière d’Yonne et rivière de Seyne, à flotte, liez et garottez, la quantité de trois grans quarterons de mosle au compte du boys, et arrivez ce jour d’hier en ceste ville de Paris, au port des Célestins, pour l’expérimentation et première foys qu’il ayt esté admene boys de chauffage en flotte du pays d’amont, et affin d’en faire admener cy-après, en la dite sorte à ses dangers, despens, périls et fortunes. » (Procès-verbal du bureau de la Ville de Paris, 21 avril 1547)

A l’instar de la forge, cette activité donna du travail à des milliers d’hommes, parfois très jeunes – un travail difficile et dangereux, notamment sur les trains de bois – et fut très lucrative pour des dynasties marchandes industrieuses. Ces familles ne manquèrent pas, la fortune venue, de se doter d’assises foncières, ajoutant des noms de terres à leurs patronymes et permettant à leurs enfants d’accéder à des charges civiles ou militaires. Comme les maîtres de forges, ils furent les nouveaux « seigneurs » de la contrée. Ils passèrent généralement sans dommage au travers de la tourmente révolutionnaire, qui ne les visait pas et n’interrompit pas leur industrie.

Chatel-Censoir était le centre d’affaires de plusieurs d’entre elles qui y ont laissé des traces. On y trouve notamment, au cœur du bourg, la Maison de Vaulabelle et la Maison Gandouard. Sur les coteaux alentours dominant les méandres de l’Yonne, et dans de petites vallées, se trouvent les domaines dont ils prirent les noms pour distinguer leurs différentes branches et afficher leur nouveau statut.

Vaux-la-Belle, transformé en Vaulabelle, est l’un d’eux, aujourd’hui abandonné en haut d’un vallon, au contact du Vézelien. Ce joli nom a même accédé à la notoriété nationale, par le truchement d’Achille Tenaille de Vaulabelle (1799-1879), député de l’Yonne et éphémère ministre de l’Instruction Publique du gouvernement républicain de Cavaignac, en 1848. Il appartenait à l’une des branches de la dynastie Tenaille, « marchands de bois pour la fourniture de Paris » dès le XVIIème siècle, à Chatel-Censoir et Mailly-la-Ville. Son frère Eléonore Tenaille de Vaulabelle (1801-1859) fut quant à lui un littérateur d’un certain renom en son temps, malgré une discrétion soigneusement cultivée. D’autres membres de cette famille occupèrent des fonctions importantes à Paris et ailleurs.

Le nom de Vaulabelle a été donné à sa maison natale à Chatel-Censoir, construite en 1742, dont l’allure seigneuriale témoigne de la position acquise par les Tenaille dans la région.


La maison de Vaulabelle

Nous avons déjà rencontré d’autres branches de cette famille à la Roussille et à Saint-Cyr près d’Entrains, ainsi qu’à Bazarnes en amont de Clamecy, au XVIIIème siècle. Une généalogie complète des Tenaille a été donnée par un ouvrage consacré  à « La famille d’Achille Tenaille de Vaulabelle » (par F. Berthier de Grandry, chez l’auteur). On y trouve mentionnées leurs nombreuses possessions, dont certaines ont complètement disparu.

La Maison Gandouard, appelée parfois « le château » localement, est un élégant hôtel particulier de style Directoire construit au cœur du bourg par un membre de cette famille : Jean Baptiste Gandouard de Montauré (1742-1813), maire de la ville. Elle illustre le statut social de cette autre dynastie de marchands de bois, connue depuis un certain Romulus, originaire de Sens, installé à Clamecy. Son fils François est cité comme « Lieutenant criminel et civil de la châtellenie de Chatel-Censoir » vers 1650 ; une charge dans laquelle son fils Godefroy lui a succédé.

La maison Gandouard

Les Gandouard se sont alliés à des familles de marchands de bois établies à Chatel-Censoir : les Robineau, venus de Paris, ou les Pirethouy, notables connus localement depuis le XVIème siècle. Ils en ont hérité de biens dans la région ou en ont acquis d’autres : Montauré, Saint-Marc, ou encore Magny, dont ils ont pris le nom.

On pourrait citer bien d’autres exemples de réussites autour de ce commerce lucratif, qui s’ajoutent à ceux de leurs homologues de Clamecy et de Moulins-Engilbert. Des forêts du Morvan à Paris, les cours des ruisseaux, des rivières et du fleuve se sont animés pendant 400 ans de cette activité audacieuse et prolifique, avant qu’elle ne soit supplantée par l’essor du charbon, comme la forge artisanale l’a été par la grande métallurgie.

Voyez des informations précises sur le flottage et de belles illustrations de ce passé glorieux sur des sites spécialisés comme :

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Misery, à Crain

(Illustration : statue de l’homme debout, dédiée à Minerve, découverte à Crain – Abbaye St-Germain-d’Auxerre)

Les fiefs de Misery et de la Grange-Folle, à Crain, sans pourvoir être considérés comme donziais au sens strict – on ne trouve pas d’hommage « à cause de Donzy » dans les archives – ont une histoire liée à celle de la châtellenie de Chatel-Censoir, rattachée à la baronnie, puisqu’ils ont été fondés par les Ascelin, vaillants chevaliers croisés des origines.

Dans cette même paroisse de Crain, nous avons déjà évoqué le fief et le manoir de Maison-Blanche, théâtre d’épisodes sanglants des conflits religieux au XVIème siècle.

Le destin de Misery reste peu documenté pour le moyen-âge ; il a été ensuite associé à celui du grand fief voisin de Faulin, à Lichères. Des familles connues de nous ont détenu ces deux fiefs  : les Tribolé d’Auxerre – dont Perrette, qui avait épousé le père de Théodore de Bèze – et les Le Bourgoing, de Faulin

A Misery, un petit château du XIXème siècle a remplacé l’ancien manoir féodal ; le domaine de la Grange-Folle conserve des traces de son passé.

Voyez ci-dessous une notice sur la succession des seigneurs de Misery et de la Grange-Folle :

Misery  (V2 du 24 sept 2021)

Nous serions intéressés de recueillir des informations plus précises sur les origines…

 

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La Rippe, à Merry-sur-Yonne

Le petit fief de la Rippe, sur les hauteurs dominant le cours sinueux de l’Yonne à Merry, était associé à son origine à celui de Magny, dont il était peut-être un démembrement.

On est là plutôt en Auxerrois, mais la proximité géographique et féodale de Chatel-Censoir nous suggère d’évoquer ce site.

La Rippe se sépare de Magny lors de l’alliance de Judith de la Borde avec Adam de Cockborne et reste dans cette famille d’origine écossaise, qui paraît détenir simultanément une partie de Magny.

Divisé à son tour, le fief est détenu en partie par une branche des sires de la Bussière, issue de celle de Vaudoisy, à la suite d’une alliance.

Voyez ci-dessous la notice consacrée à

La Rippe  (V12du 5/1/22)

…merci de vos commentaires !

 

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Avrigny, aux confins du Vézelien

Le fief d’Avrigny, aux confins du Donziais et du Vézelien, à Asnières-sous-Bois, relevait de Chatel-Censoir. Il a eu une certaine importance et a eu son château-fort, dont il ne reste que des ruines.

Cette terre détenue dès le XIIIème siècle par les sires de Mello est passée de mains en mains par des alliances à partir de Jeanne de Mello, au début du XVème siècle. Elle fut associée à celle d’Asnières – voisine mais relevant quant à elle de Maison-Blanche (à Crain), à partir du XVIIème. L’ensemble fut saisi par le roi en 1701, sans doute pour cause « d’hérésie » des seigneurs d’Avrigny.

Le fief acheva son histoire féodale aux mains des puissants Savary de Brèves puis des fameux Perrinet du Pezeau, déjà rencontrés à Faulin.

Avrigny (V4 du 7/9/22)

 

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Faulin, fief Le Bourgoing

Aux pieds d'une colline boisée, le château de Faulin à Lichères-sur-Yonne, est un magnifique ensemble architectural de la fin du Moyen-âge et de la Renaissance. Il est mentionné pour la première fois au XIIIe siècle et appartient alors aux Ascelin, seigneurs de Châtel-Censoir, qui ont essaimé aussi à Merry-sur-Yonne.

On le trouve en 1389 – dans des conditions qui restent à préciser – en la possession de Jean Le Bourgoing, sgr de Champlévrier en Morvan, d’une vieille famille nivernaise dont les descendants directs le conservent durant trois siècles et font élever, à la fin du XVe siècle, le manoir actuel. Plusieurs d'entre eux occupent des charges importantes à la cour des ducs de Nevers.

L'ensemble est constitué du château et de sa basse-cour entourés par une enceinte rectangulaire cantonnée de 3 tours circulaires, d'une tour maîtresse (donjon) et d'une tour sur plan carré. Le logis qu'on voit aujourd'hui a été construit à l’aube d’une nouvelle période de prospérité dans un style gothique puis Renaissance, plus agréable à vivre mais gardant un système défensif pour protéger les récoltes des bandits de grand chemin et des mésententes locales.

En 1699, l'héritière des Le Bourgoing de Faulin apporte le fief à Paul de Grivel de Grossouvre, sgr de Pesselières et Chauminet en Puisaye (voir ces notices) maître de camp de cavalerie, d'une famille ancienne du Bourbonnais.

Le château est vendu quelques années plus tard à David Pierre Perrinet du Pezeau, gendre d’un Fermier général, et passe ensuite par deux alliances successives aux Damas d’Antigny, et enfin aux Vogüé, sgr de Commarin, au début du XIXème. De cette époque datent les bâtiments d'exploitation qui entourent le manoir.

Voyez le site : Château de Faulin

Et ci-dessous une notice sur la succession des seigneurs ; merci de nous aider à la compléter, notamment pour les premiers échelons…

Faulin (V5 augmentée du 20/1/18)

D enluminé

 

 

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