Archives de catégorie : Nièvre

Sembrèves, papeterie sur le Sauzay

(Illustration : un moulin à papier)

Le cours du Sauzay, assez abondant, était utilisé pour le flottage du bois vers Clamecy et l’Yonne, mais il actionnait aussi des moulins à vocation industrielle. Nous avons déjà évoqué certains d’entre eux  : Croisy, le Grand-Sauzay, Le Mée.

Celui de Sembrèves, aux portes de Clamecy, était exploité en papeterie. Il relevait d’un fief de ce nom, paroisse d’Oisy, (chât. de Billy), associé à celui de Moulot (relevant de Clamecy), et à la terre de la Breuille à Lainsecq, pourtant assez éloignée. Ils constituaient ensemble le patrimoine d’une même famille. Il y aurait eu un château ou un manoir à Sembrèves, détruit au XVIIème siècle.

Le premier seigneur connu est Olivier de Champfremeux, sgr de la Breuille, avec son frère Adrien (1523). Paul de Longueville fait hommage en 1575, mais on n’a pu établir le lien avec les Champfremeux. En 1603, la terre fut saisie sur la veuve et les enfants de Jean de La Bussière, sgr du Vaudoisy, qui en étaient sans doute co-seigneurs par héritage de Nicole Madeleine de Champfremeux.

Sembrèves est alors adjugé, dans des conditions qui restent à établir mais sans doute liées aux conflits religieux, à Raymond de Gentil – déjà rencontré au Boulay et à la Breuille. Ses descendants conserveront ces terres jusqu’après la Révolution.

La papeterie établie au moulin de Sembrèves, mentionnée au milieu du XVIIème siècle, était sans doute bien antérieure. La rivière fournissait l’eau et la force. Son utilisation principale étant le flottage du bois, l’eau et donc le papier produit étaient d’une qualité médiocre. La roue du moulin actionnait des martinets qui broyaient les matériaux et formaient la pâte.

Cette petite industrie, affermée par les seigneurs de Sembrèves à des exploitants papetiers, dura jusqu’au début du XIXème siècle (cf. infra, note à ce sujet).

Voyez ci-dessous une notice présentant la succession des seigneurs de Sembrèves. Elle est tout à fait parallèle à celle de La Breuille. Des points restent à éclaircir et nous vous serons reconnaissants de vos contributions.

Sembrèves (V2 du 22/12/21)

 

 

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Annay, sur la Vrille

(Illustration : Annay : le pont sur la Vrille)

Annay, sur la Vrille, entre Arquian et Neuvy, relevait de Saint-Verain.

C’était sans doute un fief ancien, puisqu’on y fait état d’une demeure seigneuriale, mais il n’apparaît dans les actes qu’au début du XVIIème siècle. Peut-être cette terre a-t-elle été démembrée de Neuvy ou d’Arquian, ou encore du domaine de l’abbaye de Roches à Myennes ?

Elle ne figure pas en tout cas dans la liste des fiefs de Saint-Verain concernés par le partage de la succession des barons à la fin du XVème siècle, à la différence de Neuvy et Arquian, tel que les Mirot (« La Baronnie de Saint-Verain« ) l’ont proposée.

Le château actuel d’Annay a été construit au XIXe siècle sur les fondations de l’ancien. Un grand corps de logis rectangulaire est adossé à une tour carrée, seul vestige de l’ancienne construction. Par contre, l’avant-corps a été détruit après la seconde guerre mondiale, au cours de laquelle il a été gravement endommagé.

Il était parfois appelé le « château de la Borde «  par certaines sources, d’où des confusions avec La Borde à Leugny (89).

Cela pourrait suggérer qu’il s’agissait d’une « borde » – métairie relevant d’un plus grand domaine laïc ou religieux – détachée de son fief d’appartenance et érigée en seigneurie.

Merci de nous aider à éclairer les origines de ce fief, pour compléter la notice ci-jointe : 

Annay (V2 du 29 déc 2021)

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Le martyr de Bouhy

Bouhy, modeste village au nord d’Entrains – une terre de la châtellenie de Saint-Verain au moyen-âge que nous avons déjà visitée (Bouhy et Cosme) – est un site fondateur pour l’Eglise d’Auxerre : c’est là qu’en 303 ou 304 le premier évêque envoyé par Rome, Pèlerin (Peregrinus), fut martyrisé par l’armée romaine. Une église fut établie en ce lieu avant le VIème siècle.

Une fontaine rappelle ce triste événement. A cet endroit, selon la légende, un serpent paré d’un collier de perles avait révélé la cache de l’évêque au centurion, en s’enroulant autour d’un arbre. Cette bête monstrueuse apparait toujours le 16 mai au petit matin, jour de la Saint Pélerin, mais il est recommandé par la même légende de… ne pas chercher à la voir.

                       

L’église de Bouhy, simple et beau monument gothique du XIIIème siècle qui a dû remplacer l’édifice primitif, est dédiée au saint évêque.

L’action de Pèlerin, l’un des premiers évangélisateurs des Gaules, s’inscrit dans le temps tout juste après saint Denis, à Paris, saint Martial, à Limoges, ou saint Saturnin, à Toulouse. Cette ancienneté – le diocèse de Nevers ne fut fondé que deux siècles plus tard – l’origine romaine du fondateur et son martyr, ont donné une aura particulière à l’Eglise d’Auxerre. La haute figure de Saint Germain, au Vème siècle, alors que l’Empire romain s’effondre, achèvera de faire d’Auxerre un siège épiscopal prestigieux.

L’épopée de Pèlerin a été décrite par la « Geste des évêques d’Auxerre ».

L’abbé Lebeuf reprend ainsi cette histoire (extraits) : « Malgré les persécutions, la foi se propageait donc en secret, et bientôt les chrétiens de l’Auxerrois firent parvenir jusqu’à Rome leurs vœux ardents pour avoir au milieu d’eux un évêque et des prêtres ; Saint Sixte II occupait alors la chaire de saint Pierre ; il ne put se refuser aux désirs trop légitimes des peuples de l’Auxerrois, et il jeta les yeux sur Pèlerin ou Pérégrin, compagnon de saint Laurent, pour remplir cette importante mission. Après lui avoir imposé les mains, il lui ordonna de partir pour les Gaules…. »

 Saint Laurent, un des diacres du pape Sixte II, fut martyrisé sur un gril à Rome en 258. L’Empereur Constantin fit construire hors les murs, sur le site supposé de son sacrifice, l’exceptionnelle basilique qui porte son nom.

 Lebeuf poursuit : « Ce fut vers l’an 258 ou 259 que Pèlerin se mit en route, ayant pour compagnons Marse, prêtre ; Corcodome diacre ; Jovinien et Alexandre, sous-diacres, et un autre Jovinien, lecteur. Ils débarquèrent à Marseille, puis se rendirent à Lyon, laissant partout sur leur passage des marques non équivoques de leur zèle et de leur sainteté. De là ils pénétrèrent jusque sur les rives de l’Yonne, c’est-à-dire dans le pays des Gaules où l’idolâtrie avait jeté de plus profondes racines. L’Yonne, source de l’abondance et de la prospérité du pays, était adorée comme une déesse, sous le nom d’Icauna…L’éloquence, la sainteté et les miracles de Pèlerin convertirent les principaux habitants d’Auxerre ; bientôt il put construire une petite église sur les bords de l’Yonne, à la source de quelques fontaines ….»

Cet édifice primitif construit hors les murs de la cité doit être considéré comme la première « cathédrale » d’Auxerre. C’est Amâtre, le sixième évêque, qui établit la cathédrale sur son emplacement actuel au cœur de la cité. Devenue une paroisse et reconstruite en style gothique, la chapelle saint Pèlerin a été largement transformée : sa nef abrite aujourd’hui des logements et son chœur un temple protestant. Le puits dit « de Saint-Jovinien », dans lequel l’évêque baptisait, se trouvait dans une vaste cave voutée qu’on peut toujours voir sous le choeur.

                                                                  

Lebeuf reprend : «…Il y avait, à dix lieues d’Auxerre, un pays montagneux, couvert de bois qui environnaient les lacs formés dans les vallées ; la position de ce pays favorisait le culte des païens ; c’était la Puisaye, dont une partie forma le Donziais.

Entrains, Interanum, était la capitale de ce pays, ville puissante, au milieu de laquelle s’élevait le palais du préfet romain, qui ne craignait pas de prendre le titre de césar. Elle renfermait plusieurs temples dans ses murs, et, à l’exemple de Rome, elle avait admis les divinités grecques et romaines, auxquelles elle avait associé les monstrueuses idoles de l’Orient. Un Aulerque venait d’élever un nouveau temple en l’honneur de Jupiter hospitalier ; il n’avait rien négligé dans la construction de ce temple, et la richesse des décors égalait la beauté de l’architecture. On accourait de toutes parts pour le visiter. Pèlerin crut que la circonstance était favorable, et qu’il devait en profiter pour déployer tout son zèle; il s’avança donc avec courage au milieu de ce peuple, et entreprit de le détourner de ses erreurs.

                                                                                                      

 Mais à peine eut-il commencé à parler, qu’on se jeta sur lui avec fureur pour le conduire devant le juge, qui le fit provisoirement mettre en prison.

Le lieu où il fut renfermé était un souterrain proche de Bouhy, à sept kilomètres d’Entrains ; il y resta enchaîné jusqu’au moment où on l’en re­tira, pour le faire paraître devant le préfet romain. La prison ne put ralentir son zèle ; il semblait dire, avec l’apôtre saint Paul, qu’on peut bien jeter dans les fers un disciple du Christ, mais qu’il n’est point de force humaine qui puisse enchaîner la parole de Dieu ; il prêchait le vrai Dieu à ses geôliers et à tous ceux qui l’approchaient. Quand on l’eut conduit en pré­sence du préfet, il ne parut aucunement épouvanté par ses menaces, comme il ne se laissa pas gagner par ses promesses….

 Le juge, irrité, ordonna à ses soldats de le livrer entre les mains du bourreau, et aussitôt les soldats l’entraînèrent en le chargeant de coups. Epuisé par les mauvais traitements et par les rigueurs auxquelles il avait été auparavant soumis dans la prison, notre Saint était sur le point de succomber, quand un des soldats, voyant que les forces allaient l’aban­donner, lui trancha la tête de son épée. Son martyr eut lieu le 16 mai 303 ou 304, sous la grande persécution de Dioclétien. »

Sous Dioclétien (244-312) en effet, la persécution contre les chrétiens reprend. Quatre édits (303-304) sont affichés dans les villes pour désorganiser les communautés : les églises et les livres sacrés doivent être brûlés ; les évêques emprisonnés et les chrétiens qui occupent des fonctions officielles radiés, les esclaves ne peuvent plus être affranchis ; les repentis doivent être libérés ; la peine de mort est appliquée contre tous ceux qui refusent les sacrifices.

 Lebeuf : « Après le martyre de saint Pèlerin, quelques chrétiens inhumèrent avec respect ses restes précieux à Bouhy, lieu de son supplice. Son corps y reposait encore au temps de saint Germain, et bientôt on éleva une église sur son tombeau. Plus tard, le corps du saint apôtre de l’Auxerrois fut transporté à Saint-Denis, proche Paris, et il ne resta à Bouhy que sa tête et les vertèbres. »

Comme toujours les reliques du saint furent démultipliées et dispersées, mais le reliquaire de Bouhy subsiste, présenté chaque année lors de la fête votive du 16 mai.

                                                                  

Le souvenir de Pèlerin, premier évêque venu achever son périple près d’Entrains, marque le lien profond du futur Donziais avec le siège épiscopal auxerrois dès son origine. Germain le renforcera en donnant à son diocèse les grands biens de sa famille dans cette même région.

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Fontaine, associé à Pougny

Le fief de Fontaine à Saint-Père, proche de Pougny auquel il était lié, revint sans doute aux comtes de Nevers ou fut racheté par eux après avoir été détenu par les Damas de Marcilly. Il fut sans doute attribué avec Alligny à Louis de Clèves, petit-fils du duc Englibert, vers 1550, comme un apanage de bâtard.

Il est mentionné par Marolles pour des hommages avec Pougny, par les Damas au XIVème siècle, puis cité au XVIème comme étant dans les mains de Louis de Clèves.

Près de l’actuelle maison de maître, une belle grange pyramidale subsiste dans ce domaine aujourd’hui viticole (où l’on vinifie notamment le fameux Pouilly-Fumé).

Voyez ci-dessous une notice à ce sujet, établie grâce à une indication initiale donnée par un fidèle et actif visiteur du site. Il reste encore beaucoup de choses à éclaircir ! Merci de votre aide !

Fontaine (St-Père) (V4 du 23 déc 2021)

 

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Et le château de Donzy ?

Un internaute s’étonne à juste titre que nous n’évoquions pas explicitement le « château de Donzy » qui fut le siège de la baronnie et conserva ensuite ce statut au sein du comté-duché.

C’est une omission malaisée à réparer car l’histoire de ce monument est peu documentée. Il n’est d’ailleurs pas mentionné dans les ouvrages généraux consacrés aux châteaux de la Nièvre, et n’a fait l’objet d’aucune étude publiée.

Nous ne disposons pas davantage de représentations de sa configuration ancienne, à l’exception de celle proposée dans « La Nièvre à travers le passé » par Amédée Jullien (1883), qui est une intéressante reconstitution.

Voyez un cliché de cette gravure et le texte que consacre cet auteur au château de Donzy dans la notice ci-dessous :

Château de Donzy (A.Jullien)

De la vieille forteresse qui dominait la petite cité constituée progressivement autour d’elle, il ne reste de nos jours qu’une grosse tour réduite d’un étage, et un mur percé d’anciennes ouvertures. Des adjonctions et modifications ont été effectuées, notamment au XIXème siècle, pour en faire une résidence privée, entourée d’un vaste parc oblong, clos par les hauts murs en surplomb de l’ancienne citadelle.

On y entrait à l’origine par une porte fortifiée à l’est et une rampe d’accès, à l’emplacement de l’entrée actuelle, la seule praticable, tournée vers la forêt et la route de Cessy.

Des fouilles réalisées en 1998 à l’occasion de travaux ont permis de dater des Xème et XIème siècles la première occupation du site, ce qui coïncide avec l’avènement des premiers seigneurs de Donzy de la Maison de Semur, qui tenaient cette terre des anciens comtes de Chalon, et s’y fortifièrent (voir à ce sujet : « Annales des Pays nivernais », n°153 consacré à Donzy, Camosine, Nevers, 2013)

De même, on sait que le dernier seigneur en fut Louis-Jules Mancini-Mazarini (1716-1798), « duc de Nivernois et Donziois », puisque la baronnie, jointe au comté de Nevers en 1199, lui fut associée jusqu’à la Révolution. Visita-t-il seulement son vieux château lorsqu’il fut accueilli à Donzy en 1769 par Jean-Baptiste Voille de Villarnou, son ancien condisciple au Collège Louis-le-Grand ? Ce qu’il en restait fut vendu en 1792 comme « Bien de la Nation », le duc ayant été emprisonné sous la Terreur, et acheté par des particuliers.

L’histoire du château coïncide donc avec celles des barons, puis des comtes et ducs de Nevers, annexées à l’article Baronnie de Donzy.

Mais son évolution architecturale reste largement méconnue. Des étapes la jalonnent :

  • la construction aux Xème et XIème siècles de la forteresse sur la plate-forme rocheuse qui domine le confluent du Nohain et de la Talvanne, en amont du site plus ancien de Donzy-le-Pré ;
  • son démantèlement par le roi Louis VII aidé du comte de Nevers Guy, en 1170, pour punir le baron Hervé III d’un traité avec le roi Henri II Plantagenêt, et faire un exemple ;
  • sa reconstruction autorisée par le pardon du roi peu après, mais sur des bases plus modestes, poursuivie semble-t-il jusqu’au XIVème siècle ;
  • l’enfermement de Pierre de Courtenay, comte de Nevers, dans une tour du château par son vainqueur et futur gendre Hervé IV de Donzy, en 1199 ;
  • son abandon progressif, dès lors que la lignée des barons accéda au comté de Nevers

Confié à la garde de capitaines et/ou gouverneurs assistés d’une petite troupe, à l’instar des autres châteaux de même statut (Cosne, Entrains, Châteauneuf, Druyes…), le château de Donzy ne fut plus qu’occasionnellement une résidence baronniale, d’autant que le comté et avec lui la baronnie de Donzy étaient passés à des familles princières proches de la cour (Bourgogne, Clèves, Gonzague…), qui n’avaient aucune raison d’y séjourner.

L’étude sur les « Comptes des travaux exécutés aux châteaux du Nivernais » (XIVe-XVe siècle) (in BSNLSA, Nevers, T. n°28, 1933) de Léon Mirot atteste en tout cas de la présence à Donzy à cette époque d’une garnison, avec écuries, forge et armurerie.

Certains des officiers qui ont tenu la place nous sont familiers : ainsi Jean de La Rivière, chambellan, nommé capitaine par Jean de Bourgogne, cte de Nevers, au XVème siècle et Guillaume d’Assigny son gendre ; ou encore Etienne de Lamoignon, sgr de Vielmanay, au début du XVIème  ( ); et enfin plus prosaïquement Antoine Lucquet, sgr de Presles (1656) ().

Au fil du temps, la paix étant revenue en Nivernais-Donziais après les interminables épisodes sanglants de la Guerre de Cent ans et des Guerres de religion, cette fonction et le site castral qui l’abritait avaient inexorablement décliné, passant de grands féodaux à de simples officiers ducaux.

Les restes du vieux château, cachés par de grands arbres, surplombent cependant toujours la petite cité, rappelant ses origines et sa gloire passée.

Nous serions intéressés toute indication que vous pourriez nous fournir pour étoffer cette approche succincte en accédant à d’autres sources.

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